Acouphène : comment fonctionne la thérapie sonore à bruit blanc ?

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Les générateurs de bruit blanc sont-ils une solution efficace pour traiter les acouphènes ?
Bruit blanc, bruit rose, bruit rouge. Comment les thérapies sonores utilisant des générateurs de bruits neutres entendent agir sur la perception des acouphènes ?

Bruit blanc… bruit rose… bruit rouge… bruit marron… il est très facile de se perdre dans la jungle des thérapies sonores si l’on ne prend pas soin, en amont, de bien défricher toutes ces notions. Ce type de thérapies, lesquelles existent depuis bientôt une trentaine d’années, peuvent en effet paraître séduisantes lorsque l’on cherche à diminuer la présence et la perception des symptômes acouphéniques. Si leur efficacité supposée leur confère aujourd’hui un statut de réelle alternative à prendre au sérieux, il n’en demeure pas moins que les études scientifiques à grande échelle manquent en la matière. Cependant, de part la relative notoriété qu’elles ont su acquérir durant les trois dernières décennie, il nous est apparu opportun de faire un état des lieux sur le sujet. Il sera intéressant de découvrir comment fonctionne un générateur de bruit blanc et comment ce type d’appareillage entend masquer les acouphènes. Egalement, comment cette forme de thérapie peut accélérer le processus d’habituation, phénomène dont on sait qu’il joue un rôle majeur dans le traitement des symptômes acouphéniques.

🖊 Ci-dessous, une courte introduction vidéo. Pour plus d’informations et de détails sur ce sujet Acouphènes-bruit blanc, nous vous invitons à parcourir le dossier complet situé sous la vidéo.

Qu’est ce qu’un générateur de bruit blanc ?

Il s’agit d’un appareil qui peut se présenter sous différentes formes plus où moins miniaturisées. Les générateurs de bruit blancs classiques sont semblables à des radios portatives qu’il est possible de déplacer facilement afin de pouvoir en bénéficier quel que soit l’endroit de la maison où l’on se trouve.

Les versions miniaturisées du générateur sont, quant à elles, semblables à des appareils auditifs qui s’arriment directement sur les oreilles.
Il est également intéressant de noter que le bruit blanc peut aussi être utilisé via un baladeur MP3, un smartphone ou bien encore avec un simple lecteur CD. Cependant, il convient de garder à l’esprit que ces formats « sans appareillage » requièrent quelques précaution d’usage dont nous parlerons en toute fin d’article.
Dans un registre plus original certaines sociétés commercialisent des oreillers capables de diffuser un bruit blanc. Ces derniers faciliteraient l’endormissement de la personne acouphénique sans pour autant gêner son conjoint.

Objectif : parvenir au masquage de l’acouphène

Le bruit blanc a pour caractéristique d’être composé de l’ensemble des fréquences audibles par l’oreille humaine. Il est donc, à ce titre, un son composite, continu et de même intensité qui oscille entre 20 Hz et 20 000 Hz, ce qui correspond à la plage d’audibilité. Concrètement, il est possible de comparer ce type de stimulation sonore au grésillement d’une radio, au bruissement d’une télévision sans antenne ou bien encore au son que produit le souffle audio.
C’est parce qu’il est sensé comporter l’ensemble des fréquences humainement audibles que l’on prête au bruit blanc la capacité d’agir sur les acouphènes. Et c’est bien là précisément ce qu’entend réaliser cette thérapie sonore, à savoir diluer les symptômes acouphéniques dans une sorte de « soupe » acoustique neutralisante.

Le processus d’habituation en ligne de mire

Le patient qui optera pour ce type de thérapie sera amené à s’exposer quotidiennement, à raison d’environ 2h par jour durant 6 à 12 semaines, à une source de bruit blanc. L’idée clé est de faire en sorte que l’acouphène s’y noie si bien que le cortex auditif ne parvienne plus à le distinguer. Lorsque ce type de résultat est atteint, on parle alors d’habituation.
Pour plus de détails sur le phénomène d’habituation, nous vous invitons à découvrir notre sujet expert : Acouphène : comment fonctionne le processus d’habituation ?
Le bruit blanc, par son effet masquant et occultant, aiderait à faire passer au second plan les fréquences caractéristiques de l’acouphène. Ce dernier deviendrait peu à peu moins invasif et moins prégnant ce qui, par ricochet, engendrerait une diminution du stress, un apaisement du système neurovégétatif ainsi qu’un rééquilibrage du système nerveux et émotionnel.
 Il est important de garder à l’esprit que ce type de thérapie auditive ne constitue en aucune manière un remède qui aurait pour finalité de supprimer l’acouphène. Au delà d’une illusoire suppression, c’est bien une réduction de la perception qui est recherchée. Avec pour effet secondaire désirable une neutralisation plus ou moins importante du stress et de l’anxiété liés aux symptômes acouphéniques.

Une Thérapie d’accoutumance pour diminuer la connotation aversive de l’acouphène

Dans les années 1990, le neurophysicien Dr Pawel J. Jastreboff a mis en lumière une corrélation entre exposition au bruit neutre et diminution de la connotation aversive de l’acouphène.
Pour rappel, on utilise l’expression connotation aversive pour décrire un stimulus qui génère une réaction négative. Le bruit de la circulation, par exemple, constitue un stimulus gênant mais il est cependant rare qu’il induise un état dépressif. On considère celui-ci comme ayant une connotation aversive minime. Les acouphènes, en revanche, peuvent induire des états émotionnels toxiques voire, dramatiques. C’est la raison pour laquelle, lorsque les symptômes acouphéniques s’avèrent réellement problématiques, on parle de connotation aversive élevée.
Jastreboff a ainsi créé une forme de thérapie sonore particulière, la TRT (Tinnitus Retraining Therapy), qui fait une large utilisation des bruits neutres. L’idée est de parvenir, après une période de plusieurs mois, à ce que le cerveau inhibe automatiquement le signal nerveux caractérisant l’acouphène.
Il est à noter que, avant d’opter pour toute utilisation d’un bruit blanc, il apparaît pertinent de bien connaitre la fréquence de masquage la plus adaptée au trouble auditif. Cela aurait pour effet d’accélérer le processus d’accoutumance.

Les vertus supposées du bruit blanc

Nous avons vu plus haut que le bruit blanc est constitué d’un mélange de fréquences lesquelles oscillent entre 20 Hz et 20 000 Hz. Outre cette caractéristique technique purement acoustique, un tel mélange, diffusé de manière continue à intensité stable, posséderait différentes vertus qui méritent que l’on s’y attarde.

Des vertus apaisantes et relaxantes

L’apaisement et la relaxation qui serait induits par l’écoute d’un bruit blanc viendrait de sa relative monotonie. En effet, comme vous pourrez le constater grâce à l’échantillon sonore inséré un peu plus bas, ce type de bruit neutre ne brille pas par son originalité. Et c’est justement ce caractère monotone qui produirait un effet tranquillisant. En aidant à rééquilibrer le système nerveux, le bruit blanc contribuerait à réguler l’état de stress, les tensions ainsi que les crispations néfastes qui impactent négativement la vie des personnes acouphéniques. Mieux, cela induirait un cercle vertueux qu’il est possible de conceptualiser par l’équation suivante :
Moins de stress = moins de connotation aversive = une perception moindre des symptômes acouphéniques.

Une relative discrétion

Une des propriétés intéressantes du bruit blanc tient à sa relative discrétion. En effet, ce type de stimuli sonores s’avère largement « dépersonnalisé », ce qui a pour effet de le rendre quasiment furtif à notre attention. Ce n’est pas un son que l’on écoute, ce n’est pas un son qui exige que l’on se concentre dessus. Bien au contraire, le bruit blanc s’apparente à un bruit de fond, ambiant, qui tend à s’effacer dans notre conscience. Très faiblement intrusif et doué d’une connotation aversive faible, il n’accapare pas l’esprit et autorise que l’on vaque à nos occupations sans se soucier de l’ambiance sonore omniprésente mais discrète.

L’occupation de l’espace sonore

Lorsque l’on se trouve dans une pièce insonorisée, le silence est tel que la moindre onde sonore est d’office captée par nos oreilles, traitée par le cortex auditif et portée illico presto à notre conscience. Tant et si bien qu’aucun bruit ne peut nous échapper. Or, le bruit blanc, de par sa capacité de masquage, tend à occuper une partie de l’espace sonore. A l’inverse du silence au sein duquel tout stimulus échappe à toute filtration, la « soupe acoustique » créée par le bruit blanc va justement jouer un rôle de filtre en noyant certaines fréquences telles que l’acouphène. L’idée est donc de faire en sorte que, petit à petit, le cerveau ne prête plus attention au signal acouphénique.

L’hypostimulation du système nerveux

De part sa monotonie et son omniprésence plusieurs heures par jour, le bruit blanc installe une sorte d’ennui que l’on peut nommer hypostimulation.
Il faut savoir que notre cerveau a besoin d’être stimulé. Or, lorsqu’il ne l’est plus, cela créé une sorte de désintérêt. Le bruit blanc, en installant progressivement un « ennui acoustique » va produire une hypostimulation du système nerveux.

Concrètement, cela signifie que le désintérêt va s’étendre jusqu’au stimuli acouphéniques. Noyés dans le champ du bruit blanc, les acouphènes seront peu à peu banalisés, ils perdront de ce fait une part de leur connotation aversive ce qui aura pour effet de diminuer leur saillance, c’est à dire leur faculté de surgir au premier plan de notre conscience.

Les deux autres catégories de sons : le bruit rose et le bruit brownien

Pour rappel, le bruit « blanc » rassemble toutes les fréquences du champ d’audibilité humaine. Le bruit « rose », plus grave, présentera une nuance acoustique intéressante. Enfin, le bruit « marron » appelé bruit brownien sera caractérisé par des fréquences encore plus graves.​

Le bruit rose

Le bruit rose est comparable au léger bourdonnement d’un transformateur électrique. Il s’agit d’un son dont le volume sonore des fréquence décroit de 3 décibels par octave. Sa caractéristique est de reposer sur une palette acoustique réduite. On prête à ce type de bruit la capacité de restaurer un certain confort auditif, là où le bruit blanc travaillera plus en profondeur. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle il serait bénéfique d’alterner ces deux variantes.
Afin que vous puissiez vous faire une idée précise de ce qu’est un bruit rose, voici un échantillon que vous pouvez écouter directement en cliquant sur le bouton de lecture :

Le bruit brownien
Egalement connu sous les appellations « bruit rouge » ou bien encore « bruit Brown » du nom du botaniste écossais Robert Brown lequel a mis en lumière ce que l’on nomme le « mouvement brownien », un son qui se singularise par une décroissance de 6 décibels par octave.
Le bruit brownien est un bruit thérapeutique généralement utilisé pour traiter les personnes sujettes à l’hyperacousie (voir notre sujet expert : Qu’est ce que l’hyperacousie ?).
Il serait plus efficace chez les personnes souffrant d’une déperdition auditive affectant les fréquences graves. Le recours au bruit rouge serait également pertinent en cas de perception acouphénique continue de type « bruit de moteur ».

Une thérapie qui s’inscrit dans la durée

Il faut savoir que la thérapie sonore utilisant un générateur de bruit blanc exige une bonne dose de motivation ainsi qu’une grande assiduité. En effet, les personnes qui optent pour ce type de traitement doivent s’exposer à ce type de stimulation de manière quotidienne (à raison de 2h par jour minimum) et ce, durant une période comprise entre 6 et 12 semaines.
Les laboratoires Unisson évoquent même une durée de traitement minimum de 6 mois ce qui fait de cette forme de thérapie un traitement exigeant vers lequel il ne faut s’orienter que si l’on est prêt à y investir suffisamment de temps et d’énergie.

A quels résultats faut-il s’attendre ?

Bien que l’utilisation des bruits neutres dans le cadre du traitement des acouphènes ne soit pas, à ce jour, entièrement validée par le milieu médical et scientifique, il ne nous parait pas inopportun de mentionner deux retours d’expérience. Le premier nous vient des laboratoires Unisson, le second émane de la Fédération de recherche 3C laquelle est liée au CNRS.

Le retour d’expérience des Laboratoires Unisson™

Selon cette entreprise, 50% des personnes suivies décriraient une baisse notable de l’intensité ainsi que de la fréquence de surgissement de l’acouphène.
En outre, il apparaîtrait que près d’une personnes sur cinq rapporterait une disparition complète ou quasi complète de leur acouphène chronique.
Notons également que, toujours selon les dires des laboratoires en question, près d’une personne sur trois avouerait que la thérapie n’a eu aucun impact sur leurs symptômes acouphéniques, précisant tout de même que la tolérance de ces derniers serait plus haute.
Notons que, dans l’attente d’études scientifiques complémentaires sur le sujet, il nous parait opportun de considérer ces retours d’expériences avec toute la prudence qui est de mise.

L’étude menée par la Fédération de recherche 3C

La Fédération de recherche 3C, pour Comportement, Cerveau et Cognition, a rapporté une amélioration des symptômes acouphéniques chez près d’un patients sur deux dès la sixième semaine de traitement.
Précisons ici qu’il s’agissait d’une thérapie utilisant un bruit rose. Toujours selon cette fédération 3C, il apparaîtrait qu’une rééducation faisant usage de bruits blancs pour traiter l’hyperacousie devrait s’étaler sur une période minimale de 12 semaines.

La solution de l’appareillage

Dans l’éventualité où l’utilisation d’un appareil mobile de génération de bruit blanc serait trop contraignante, il peut alors s’avérer judicieux d’opter pour la pose d’un appareil auditif lequel s’insérera directement sur l’oreille.
A titre informatif, sachez que ce type d’appareillage peut représenter un investissement important : de l’ordre de 500€ minimum par oreille, précisant que le coût de ce matériel n’est pas pris en charge par la sécurité sociale.

Quelques mises en garde importantes

Privilégiez une écoute à bas volume

Il est important de garder à l’esprit que ce type de thérapies sonores nécessite une écoute à bas volume. Idéalement, juste au dessus du seuil de l’audition. En effet, le bruit utilisé, que ce dernier soit blanc, rose ou rouge, ne doit jamais engendrer de fatigue.

Méfiez-vous des solutions de piètre qualité acoustique

On ne le sait pas forcément mais le fait est que bien souvent, certains des générateurs de bruit blanc proposés sur le marché n’offrent pas la qualité acoustique requise. Qu’il s’agisse de CD, de supports 100% numériques ou bien d’appareils itinérants, il convient de se méfier des formats mal échantillonnés, des MP3 dont la compression dénature les sons ainsi que des pistes sonores générée par des logiciels dont la précision laisse à désirer.
 Il parait en effet difficile de distinguer à l’oreille un souffle analogique basique d’une réelle bande sonore comportant toutes les fréquences adéquates. C’est la raison pour laquelle il est préférable de bien se renseigner en amont, auprès de professionnels de la sphère ORL, avant de s’engager dans ce type de thérapie sonore.

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